Chapitre 7 : La traversée inca
- Loïck RL
- 28 nov. 2018
- 4 min de lecture
Descendu de mon volcan, quelques courbatures et une nuit peu ensommeillée en bus après, j'arrive à Cuenca. Je devais initialement aller à Guayaquil, mais suite aux conseils de tous les Équatoriens que j'ai rencontrés, j'ai changé mon programme. Il paraît que cette ancienne ville coloniale est autant plus jolie qu'elle est moins dangereuse que sa sœur sur la côte. Et le moins qu'on puisse dire c'est que c'est vrai. J'ai le plaisir de découvrir les vestiges d'une ancienne grande cité inca, de nombreux bâtiments à l'architecture coloniale, et même une cathédrale aux tours infinies. Infinies par leur hauteur, mais aussi et surtout dans le sens où l'architecte de cette dernière s'est rendu compte que ses calculs étaient erronés alors que l'ouvrage était déjà bien commencé. La construction des flèches s'est donc arrêtée plus tôt que prévu dans les années 1910 pour éviter que tout ne s'effondre. Elles ne seront alors de fait jamais finies. C'est donc les yeux ravis que j'achète mon billet pour mon troisième pays, le Pérou.
Le bus de nuit s'arrête aux alentours de 1h du matin à la frontière. Cette fois, à la différence du passage Colombie-Équateur, il y a des centaines de migrants vénézuéliens. Il ne font pas la queue pour passer le poste-frontière, mais ils dorment sur des matelas par terre voire à même le sol pour certains. Le chauffeur nous explique qu'ils n'ont pas de passeport valable ou pas de passeport du tout leur donnant le droit d'entrer. Ils attendent alors là espérant qu'une loi change ou que des démarches engagées auprès de leur pays avancent et leur permettent de suivre leur exode. Nous sommes à quelques mètres de distance, et pourtant un petit livret en cuir nous place dans des mondes différents. À 2h30 je rentre donc au Pérou, et à 9h j'arrive, certes un peu fatigué, à Piura. Cette ville m'avait attiré sur la carte, mais il s'avère qu'il n'y a en réalité rien d'autre que des rues pauvres au milieu d'un désert et des hôtels trop chers pour moi. Le plus abordable que je trouve est un peu miteux. Bon, ce n'est pas la meilleure première journée que j'avais espérée, mais ça fait partie de l'aventure. Pour rejoindre ma prochaine destination, l'aridité et le manque de sécurité du lieu me font pencher pour le bus plutôt que pour l’auto-stop. Je me pose alors à Chiclayo, qui me semble déjà moins austère que sa voisine. Je suis venu ici pour y découvrir la culture et l'histoire des Moches. Je ne parle évidemment pas des personnes ayant une plasticité et un physique avec un effet plutôt répulsif envers les êtres vivants de la même espèce, mais bel et bien d'une civilisation ayant connu son apogée vers 400 ap. J.-C. Leur déclin, vers 700, est dû à des sécheresses et des tremblements de terre, puis le coup de grâce fut porté par des peuples avoisinants, les ayant envahis et colonisés (eux-mêmes envahis par les incas quelques siècles après). Sur toute la côte nord ont de ce fait été trouvés des restes de cités et de temples, mais également tout un système d'acheminement d'eau depuis les rivières descendant des montagnes pour permettre l'agriculture au milieu du désert. Le plus impressionnant sont deux pyramides qui, bien qu'elles aient souffert du temps, sont immenses et ont été construites avec plus de briques que les pyramides de Khéops. Des momies des chefs spirituels et politiques recouvertes de bijoux en or finement sculptés et de colliers de coquillages et de pierres semi-précieuses ont permis dans les années 1950 de comprendre enfin le peuple moche. Je poursuis ma route côtière jusqu'à Lima, capitale du pays. La légende sur les origines de la construction de cette ville me fait beaucoup sourire. Les Espagnols, après avoir défait les Incas, leur auraient demandé où fonder une nouvelle capitale accessible en bateau. Comme petite vengeance, ces derniers auraient indiqué ce lieu, où le climat est quasiment perpétuellement brumeux, humide et peu agréable. Malgré tout, la chance me souriant, c'est sous un ciel bleu que je me promène dans les ruelles aux bâtiments coloniaux et que je découvre monastères et ossuaires. Je poursuis ma visite des civilisations incas et pré-incas par Nazca. Cette ville, se situant en plein désert, est connue dans le monde entier pour ses géoglyphes immenses. Effectués entre -200 et +600, ce sont de gigantesques dessins et formes géométriques qui s'étendent sur une vaste plaine aride. Ils ont été réalisés en déplaçant des pierres noires, constituant la première couche du sol, pour laisser apparaître le sable blanc en dessous. Le plus impressionnant est que par leur taille s'élevant à quelques dizaines de mètres chacun, ils ne sont visibles que depuis un avion à 100 m au-dessus du sol. Les théories sur leur but fusent et sont nombreuses : de la piste d'atterrissage pour extraterrestres au calendrier solaire, chacun y rajoute son avis sur ce mystère. Le plus probable est que la civilisation, évoluant dans le désert où l'eau est très précieuse, aurait fait ces dessins comme invocation aux dieux pour avoir de la pluie. Dans tous les cas, ces fragiles œuvres d'art n'en sont pas moins fantastiques. Il est maintenant temps de me poser. En effet, mes jambes me tirent de plus en plus et je suis chaque jour un peu plus fatigué. Je réalise à cet instant que je voyage depuis un mois et trois semaines environ, ne dormant jamais plus de trois nuits au maximum au même endroit et ne comptant que sur moi-même au quotidien. Il est temps que je souffle un peu. Je monte donc dans mon bus de nuit pour aller à Cuzco, ville où je suis sensé rester travailler dans un guest house jusqu'à fin Janvier. C'est ainsi que, bercé par le bruit de la femme vomissant derrière moi, par les pleurs de son enfant, par la lampe torche aveuglante d'un homme cherchant quelque chose tombé par terre, ou encore par les gens parlant à voix haute comme en plein jour et la musique du chauffeur avec un problème certain d'audition, je fais la route sans vraiment fermer l'œil de la nuit. Car oui, en Amérique Latine, ou du moins dans les trois pays que j'ai fait, on ne sait pas être discret. C'est aussi ainsi que, crevé mais soulagé, j'arrive à la capitale inca tant attendue.
Ciao mon cher ami ! J'avais quelques chapitres de retard et ce soir j'ai tout lu et j'ai pu continuer à rêver grâce à tes descriptions ! Ne t'épuise pas trop dans cette belle Odyssée et continue à t'extasier devant les belles personnes que tu rencontres et les beaux paysages que tu contemples ! Bonne route ... On t'embrasse très fort !!!!
bonjour loick on est en train de fêter l'anniversaire de ta maman à la maison.
Je te lis depuis le début mais je ne savais pas t'envoyer de message eureka. Tu me fais rêver, quand tu rentreras tu auras fait le plein de souvenirs pour un sacré bout de temps. Attention tu auras peur être attrapé le virus. Grosses bises.
En regardant tes photos, cela nous ramène à un peu plus de trente ans, nous avions vu ces ma fameuses lignes au sol que l'on peut voir essentiellement d'avion. C'est toujours impressionnant et magnifique.